« Punis parce qu’ils sont pauvres. Le recours injustifié, excessif et prolongé à la détention préventive à Madagascar». Tel est le titre du rapport des visites effectuées dans neuf établissements pénitentiaires de Madagascar par l’équipe d’Amnesty International. « A cause d’une succession de dysfonctionnements dans la chaîne pénale malagasy, de nombreuses personnes souffrent en prison pendant des années avant d’être traduites en justice. Un homme inculpé pour vol de bétail était maintenu en détention depuis trois et demi », déclare le directeur du bureau régional pour l’Afrique australe d’Amnesty International, Deprose Muchena, lors de la présentation du rapport, le 23 octobre 2018.
En octobre 2017, 55% du total de la population carcérale n’avait pas encore été jugé. Soit 11.000 personnes ont été placées arbitrairement en détention préventive, souvent pour des années. La majorité des détenus en attente de procès sont des hommes, mais certaines conditions de détention affectent les femmes et les enfants de manière disproportionnée. Les femmes enceintes ou accompagnées de bébés, par exemple, ne peuvent recevoir les soins de santé dont elles ont besoin.
Amnesty International a constaté également que les détenus se retrouvent souvent en détention préventive prolongée pour des infractions mineures et non violentes telles que le vol de poulets ou de téléphones portables, ou la contrefaçon. Cette pratique a abouti à une grave surpopulation qui, associée au manque de nourriture, de soins médicaux et d’hygiène dans les installations, nuit à la santé des détenus et met leur vie en danger. D’où, les 129 détenus décédés en 2017 dans les prisons malagasy, 52 se trouvaient en détention préventive. Aux termes du droit international relatif aux droits humains, les personnes en attente de jugement ne devraient pas être incarcérées, à moins d’un risque avéré que le responsable présumé des faits prenne la fuite, intimide un témoin ou falsifie des preuves. De même, la constitution de Madagascar prévoit que la détention préventive est une exception. « Il y a une violation de la constitution », a affirmé la conseillère d’Amnesty International à Madagascar, Tamara Leger. Attendre et voir la prise de décision de l’Etat face à ce désastre.
Recueilli par Lynda A.